Le projet

Opus Source : un laboratoire d’idées pour les patrimoines

Dans le prolongement de son projet scientifique d’observatoire des patrimoines, l’Institut Opus s’est doté d’un nouvel espace de réflexion et d’intervention : Opus Source.
Conçu comme un think tank, Opus Source s’inscrit dans la dynamique du programme Sciences-Société de l’Alliance Sorbonne Université. Sa mission est de créer un lieu d’échange, de rencontre et d’expérimentation à l’interface entre les mondes académiques, institutionnels et socio-économiques, liés au champ vaste du patrimoine et de la culture.
Ce champ ne cesse, en effet, de se redéfinir sous l’effet des évolutions, des transitions ou des crises, mais aussi des innovations et des hybridations qu’elles entraînent. Face à ces processus, Opus Source entend observer, analyser et anticiper les mutations du patrimoine contemporain, pour se constituer comme un outil d’aide à la compréhension, à l’accompagnement et à la décision.

Ses travaux se définissent par :
    •    une approche interdisciplinaire, croisant sciences humaines, sociales et techniques ;
    •    une activité de mise en réseau des acteurs et des terrains d’études ;
    •    une volonté d’utilité publique, notamment en lien avec les stratégies culturelles et territoriales.

 

4 questions à Olivier Aïm, responsable scientifique du think tank

Qu’est-ce qui a motivé la création d’OPUS Source au sein de l’Institut OPUS ?

La fonction première de l’institut OPUS est d’organiser les conditions d’une recherche dynamique, qui s’inscrive dans la grande diversité interdisciplinaire de l’Alliance Sorbonne Université. Ce travail d’élaboration et d’animation scientifique est essentiel, mais nécessitait d’être complété par la création d’un outil plus spécifique d’intervention auprès des acteurs publics et socio-économiques. Face aux évolutions, aux transitions ou même aux injonctions multiples (numériques, environnementales, sociétales, notamment), la demande est forte du côté des institutions, des territoires, mais aussi des agences, d’une aide à la décision, qui me semble inséparable d’une aide à la compréhension des processus en jeu. Afin de répondre à cet ensemble de questionnements, tout en étant en phase avec les missions du programme Sciences-Société de l’Alliance Sorbonne Université, la forme think tank s’est imposée comme étant la mieux adaptée. 
Je parle bien de « forme » think tank car il ne s’agit pas de reprendre une définition étroite et encore moins politique de ce type de structures, mais une définition ouverte, nourrie par la recherche, l’expérimentation et la mise en dialogue entre les acteurs et les terrains les plus diversifiés. 
Pour résumer, on pourrait dire que la vocation d’OPUS Source est de prendre du temps, de la distance et de la hauteur sur les transformations en cours, mais aussi de prendre le pari du renouvellement des approches et des perspectives.  

Comment fonctionne concrètement un think tank comme OPUS Source ?

A la différence d’un groupe de recherche, OPUS Source se définit, avant tout, comme une interface de recherche, destinée à réunir les mondes intéressés par le patrimoine, ses transformations, ses médiations, ses pratiques, ses appropriations. L’idée maîtresse est de concilier l’opérativité d’un think tank avec la réflexivité d’un espace d’élaboration interdisciplinaire.

Cela peut paraître paradoxal, mais le choix de la forme think tank correspond au désir de mettre en perspective les questions les plus actuelles avec des études amples en termes de terrains et de temporalité. Plutôt que de s’aligner sur l’injonction à l’accélération, l’objectif d’OPUS Source est, comme son nom l’indique, de s’ouvrir aux enjeux qui se posent concrètement aux acteurs, pour revenir aux sources de leurs questionnements et d’opérer des recherches empiriques aptes à fournir des ressources qui les aident à y répondre.

De manière très opérationnelle, le think tank pourra déployer, en fonction des projets et des demandes, toute une gamme d’enquêtes, d’observations et d’études, mais aussi de rencontres, de tables-rondes et de séminaires. Ces approches doivent se matérialiser sous la forme de livrables à la fois solides méthodologiquement et appropriables socialement (rapports, analyses, fiches projets, livres blancs…).

L’étude inaugurale s’intitule “Musées et offres de médiation numérique – quelle(s) durabilité(s). Pourquoi avoir choisi le numérique dans les musées comme premier sujet d’étude ?


Le choix de la thématique numérique pour la première étude s’est fait, pour tout dire, avec une certaine évidence. Le fait est que, depuis plusieurs années, le champ du patrimoine est particulièrement saisi par un débat grandissant autour de la place que le numérique doit avoir au sein de ses dispositifs de médiation et d’hospitalité. Sous la forme de la restitution, de la visite virtuelle, de l’immersif ou de l’IA, la transition numérique fait partie des grands défis pour tous les lieux culturels, à commencer par les musées.
Si l’on adopte un point de vue analytique, on peut dire que ce questionnement est caractéristique des grands discours de l’innovation, qui prennent parfois la forme d’une injonction : en l’occurrence, l’injonction à « faire du numérique ». Ces discours sont reçus et vécus de manière très variable selon les acteurs, engageant des réponses et mobilisant des ressources extrêmement diverses, sans que ces démarches soient vraiment discutées, documentées ou simplement mises en perspective. C’est précisément ce type de sujets que doivent venir éclairer les études, les partages d’expérience et les préconisations développés par OPUS Source. 
C’est pourquoi nous avons voulu consacrer nos premiers efforts à une étude largement renouvelée du sujet, en faisant varier un certain nombre de critères : l’ancrage territorial, la diversité des modèles de gouvernance et de financement, la disparité des objectifs de la médiation patrimoniale en tant que telle. Cela nous a conduit à étudier sur plusieurs mois une grande diversité d’acteurs, de territoires et de réalisations, tout en nous focalisant sur la question des médiations numériques in situ, qui n’avait pas vraiment été abordée dans les études existantes. Au total, près d’une trentaine de musées ont été étudiés sous la forme d’analyses, d’entretiens et d’observations. 


Sans entrer dans le détail des nombreux résultats du rapport, deux constats peuvent être cités ici :

-    Un premier résultat transversal fait apparaître le primat de l’enjeu de durabilité. Ou plutôt des durabilités. Bien identifiée sur le plan environnemental, cette question s’est finalement imposée sur les autres plans de l’enquête : durabilité technologique, durabilité économique, durabilité de l’organisation et de la gouvernance des musées. Loin d’être juxtaposés les unes aux autres, ces enjeux de durabilité se croisent et forment des composites qui méritent d’être finement élucidés.

-    Autre résultat marquant d’un point de vue empirique : la réalité des observations montre une extraordinaire hétérogénéité des besoins et des modélisations de ce que l’on appelle rapidement les « offres numériques ». Pas moins de douze définitions sont apparues selon les acteurs.
Sur le plan opératoire de l’étude, les différents résultats de terrain ont ainsi donné lieu à une trentaine de retours d’expériences et de fiches projets, qui débouchent sur la mise en relief de bonnes pratiques et de préconisations. Ces éléments dressent finalement une cartographie extrêmement fouillée des pratiques numériques au sein des musées français. 

 

Quelles seront les prochaines étapes d’OPUS Source après cette étude inaugurale ?

OPUS Source entend poursuivre son travail selon plusieurs axes de développement. 

Il s’agit d’abord de faire connaître les résultats de cette première étude en la diffusant auprès de plusieurs publics concernés : acteurs institutionnels, réseaux professionnels du secteur muséal et culturel (direction d’établissements, responsables des publics, de la médiation, du numérique ou de l’événementiel), partenaires des institutions culturelles et patrimoniales : studios de création, producteurs, agences d’ingénierie, sociétés d’exploitation, universitaires, etc.). Plusieurs rendez-vous sont pris auprès de ces acteurs notamment à l’occasion des grands événements et salons qui les réunissent.

Dans un deuxième temps, d’autres études sont en préparation sur d’autres grands enjeux patrimoniaux : la place des territoires, la transition environnementale et l’hospitalité sont ainsi trois questions qui nous semblent cruciales pour anticiper les grandes mutations du secteur.

Enfin, nous aimerions créer des rendez-vous au cours de l’année sous forme d’espaces de réflexion en partenariat avec différents types d’acteurs impliqués dans les grands enjeux que nous venons d’évoquer.